
Regragui vs médias : une relation en constante évolution, selon Hamza Hachelaf
Comment décririez-vous l’évolution de la relation entre Walid Regragui et les médias depuis sa prise de fonction en 2022 ?
Je pense que cela a toujours dépendu du contexte. Avant la Coupe du Monde, Walid était dans une sorte de zone de confort, où personne ne l’attendait vraiment. On n’attendait pas de lui de grands résultats. C’était un moment de communion et de soutien pour sauver l’honneur du football national.
Puis il y a eu la surprise. Le rapport de force a changé après la Coupe du Monde, avec un Walid plus dans le show, plus dans le mainstream, avec beaucoup d’apparitions médiatiques et une grande confiance avec les médias, puisqu’il revenait d’une demi-finale de Coupe du Monde.
Je pense que la tension est montée avec les matchs précédant la Coupe d’Afrique, à cause des prestations et du doute ressenti avant la CAN. Et après la CAN, tout a encore changé, mais cette fois-ci pas dans l’intérêt de Walid. Il revenait d’une élimination en huitièmes de finale, un fiasco. Depuis, les rapports avec les médias ne se sont pas rétablis.
Le mal est fait, et aujourd’hui, on est dans une sorte de tension permanente. Je pense que cela va durer jusqu’à la veille de la Coupe d’Afrique.
Une communication dictée par le contexte
Pensez-vous que Regragui communique de manière stratégique ou réactive face aux critiques médiatiques ?
Je pense que Regragui communique selon le contexte. Si l’on prend le dernier exemple, lors de la dernière fenêtre FIFA, je dirais qu’il devient plus agressif, plus offensif quand il est sur la défensive. Quand il sent que sa place est en jeu, qu’il risque un limogeage, qu’il n’est plus autant soutenu par l’opinion publique, il attaque.
Quand on le confronte à ses propres contradictions en conférence de presse, il adopte une posture offensive. Est-ce réactif ou prémédité ? Difficile à dire. Mais dans tous les cas, on est face à la communication d’un homme affaibli par les résultats, les prestations et le niveau actuel de l’équipe nationale.
Une pression médiatique mesurée
Y a-t-il, selon vous, une pression médiatique excessive sur le sélectionneur ? Pourquoi ?
Non, je ne pense pas qu’il y ait une pression médiatique excessive sur le sélectionneur. Si on compare le traitement médiatique que la presse marocaine réserve à Regragui avec celui réservé à d’autres sélectionneurs, la réponse est clairement non.
Regragui a bénéficié de plus de soutien de la part des médias que n’importe quel autre sélectionneur. Globalement, la presse marocaine est clémente avec lui. Elle pose des questions en conférence, sans avalanche médiatique. On est plutôt dans la patience et la critique constructive.
Le débat footballistique au Maroc a beaucoup évolué. Je pense qu’on est dans un contexte très différent de ce qu’on voyait avant, pour plusieurs raisons : le paysage médiatique a changé, et le rapport avec l’équipe nationale aussi. Non, je ne pense pas qu’il y ait de pression médiatique excessive sur Regragui.
Une communication qui lui porte préjudice
Les conférences de presse de Regragui sont parfois très directes. Pensez-vous que cela joue en sa faveur ou lui porte préjudice ?
Je pense que cela lui porte préjudice. Tout dépend des résultats : si l’équipe nationale enchaîne les prestations convaincantes, avec des choix clairs et une logique qui rassure le public, alors cette communication directe peut lui servir.
Mais quand il sème le doute dans l’esprit des supporters et des médias, je pense qu’il devrait opter pour l’apaisement et une remise en question de lui-même et de ses choix. Sa communication actuelle lui porte préjudice. Au-delà des débats tactiques, le vrai point faible de Walid Regragui aujourd’hui, c’est sa communication. Paradoxalement, c’était l’un de ses atouts auparavant.
Hamza Hachelaf : « Regragui bénéficie toujours du soutien public »
Diriez-vous que le soutien populaire au sélectionneur a diminué, augmenté ou s’est transformé depuis la Coupe du Monde 2022 ?
On n’a pas de chiffres précis, mais cela dépend des catégories sociales. Le grand public soutient encore Walid, car il n’est pas trop regardant sur les choix tactiques. Ce ne sont pas forcément des passionnés de football. Pour ce public, Walid reste apprécié pour le crédit qu’il a acquis lors de la Coupe du Monde 2022.
En revanche, chez les supporters les plus avertis, les vrais passionnés de football, le rapport a clairement changé. Cela dit, il conserve toujours du soutien. Je pense qu’aujourd’hui, l’opinion publique est partagée sur la gestion de l’équipe nationale par Regragui. C’est normal. Il faut simplement savoir gérer cela.
La passion populaire, un moteur
La passion populaire est-elle un moteur ou un frein pour le travail qu’il essaie de mener ?
Bien sûr que la passion populaire est un moteur pour l’équipe nationale. C’est notre principal capital. C’est ce qui fait la différence entre le Maroc et les autres pays africains. Je dis toujours que le Maroc est un peu l’Angleterre de l’Afrique en termes de passion et de ferveur pour le football.
C’est un vecteur, un levier de développement du football chez nous. Cette passion populaire sera un atout majeur pour la CAN 2025 au Maroc. Il y aura une vraie communion autour des Lions de l’Atlas. Les débats tactiques et stratégiques sur Regragui vont s’estomper à l’approche du tournoi. Cette ferveur est un moteur pour les Lions, et non un frein.
Propos recueillis par Abderrahman Ichi
Entretien : « Regragui sous pression : l’analyse tranchée d’Amine El Amri »
Hamza Hachelaf en bref
Hamza Hachlaf est un journaliste sportif marocain reconnu pour son expertise et sa présence médiatique. Il est actuellement journaliste sportif à 2M.ma, la plateforme numérique de la chaîne de télévision marocaine 2M, où il couvre les événements sportifs nationaux et internationaux. Parallèlement, il intervient en tant que chroniqueur dans l’émission « La Bombonera » sur Radio 2M, offrant des analyses pointues sur le football marocain et international.
